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Sans entrepreneurs, il n’y a pas d’emplois. Il est crucial de reconnaître que ces derniers sont le moteur de notre économie et qu’ils méritent un soutien équivalent. »

Sébastien Hamende

 

 

Depuis combien de temps le programme Revival existe-t-il et qu’est-ce qui a inspiré sa création ?

Sébastien Hamende : « Revival a été créé en décembre 2020 par la fondation Pulse. L’inspiration derrière sa création est venue pendant la pandémie de COVID-19, lorsque le monde s’est arrêté et que la fondation cherchait des moyens d’avoir un impact significatif. À cette époque, on prévoyait un “tsunami de faillites” en Belgique, avec des chiffres estimés entre 50 000 et 60 000 faillites en une année, contre les 12 000 à 14 000 habituelles. La fondation Pulse a constaté qu’il n’existait aucune structure en Belgique à même d’aider les entrepreneurs à rebondir après une faillite. En s’inspirant d’une association française appelée “60 000 Rebonds”, qui aide les entrepreneurs à se relancer avec un accompagnement individuel et collectif, la fondation a décidé d’implémenter un programme similaire en Belgique. C’est ainsi qu’est né Revival, avec pour mission de soutenir les entrepreneurs pour rebondir tant personnellement que professionnellement après l’arrêt de leur activité. »

 

Que faites-vous exactement chez Revival ? Pouvez-vous détailler les services spécifiques que vous offrez aux entrepreneurs en difficulté ?

Sébastien Hamende : « Chez Revival, nous sommes aux côtés des entrepreneurs qui doivent arrêter leur activité, en les soutenant à chaque étape de leur parcours. Après avoir analysé leur situation de manière approfondie, nous les guidons dans les démarches administratives. Ensuite, nos coachs et mentors bénévoles les accompagnent individuellement pour les aider à rebondir, que ce soit vers un nouvel emploi ou un nouveau projet entrepreneurial. Chaque mois, nous organisons des rencontres collectives où ils peuvent échanger, se soutenir et créer de nouveaux liens. Par ailleurs, grâce à nos partenaires, nous proposons des bilans de compétences personnalisés pour les aider à identifier leurs atouts et à définir leurs objectifs. Enfin, nos formations et ateliers leur donnent les clés pour acquérir de nouvelles compétences et saisir les opportunités qui se présentent. »

 

Pouvez-vous détailler le processus d’accompagnement personnalisé en deux étapes que vous proposez, à savoir l’aide de première ligne et l’aide de deuxième ligne ?

Sébastien Hamende : « L’aide de première ligne, soit la phase initiale, consiste en un diagnostic complet de la situation de l’entrepreneur. Nous collectons toutes les informations nécessaires pour comprendre l’état de la faillite, qu’elle soit prononcée ou en cours, et nous assistons l’entrepreneur dans les démarches administratives telles que l’arrêt de leur statut d’indépendant, l’activation de leurs droits sociaux, et les contacts avec les organismes publics comme le Forem, l’Onem, ou Actiris. L’objectif est de stabiliser la situation administrative et juridique de l’entrepreneur. Une fois les aspects administratifs réglés, nous passons à un accompagnement plus approfondi, que nous appelons aussi l’aide de deuxième ligne. Chaque entrepreneur est soutenu par un coach bénévole qui l’aide à tourner la page du passé, gérer la courbe du deuil, et retrouver de l’énergie pour se relancer. En parallèle, un mentor travaille avec l’entrepreneur pour définir ses objectifs futurs, que ce soit un retour au salariat ou une nouvelle aventure entrepreneuriale. Il l’aide à identifier ses forces et ses faiblesses et à élaborer un plan d’action. Nous proposons également des sessions de codéveloppement mensuelles où les entrepreneurs peuvent partager leurs expériences et apprendre des autres, créant ainsi un réseau de soutien et de motivation. Si nécessaire, nous les orientons vers des professionnels de la santé mentale pour stabiliser leur situation avant de poursuivre l’accompagnement. »

 

Vous mentionnez la notion de deuil sur votre site. J’imagine que les entrepreneurs qui viennent frapper à votre porte ont souvent le moral en berne. Quel soutien émotionnel leur apportez-vous et comment les accompagnez-vous dans cette étape du deuil ?

Sébastien Hamende : « Chez Revival, l’aide émotionnelle aux entrepreneurs en difficulté se déroule en deux phases distinctes. En première ligne, nous commençons par une écoute active et une assistance technique pour gérer les aspects administratifs et juridiques de la faillite, stabilisant ainsi la situation immédiate de l’entrepreneur. En deuxième ligne, une fois ces aspects réglés, nous passons à un accompagnement plus profond. Un coach bénévole aide l’entrepreneur à gérer la courbe du deuil, à retrouver de l’énergie et à tirer des apprentissages de la faillite, tandis qu’un mentor l’aide à définir ses objectifs futurs, que ce soit un retour au salariat ou une nouvelle aventure entrepreneuriale. Si la détresse émotionnelle est trop forte, nous orientons l’entrepreneur vers un thérapeute, car un coach n’est pas un thérapeute. Nous collaborons avec des structures spécialisées comme “Un pass dans l’impasse” pour offrir un soutien psychologique adapté. »

 

Qui fait appel à vos services ? Quel est le profil typique des entrepreneurs qui sollicite votre aide ?

Sébastien Hamende : « Chez Revival, nous accueillons une grande diversité d’entrepreneurs en difficulté. En Belgique, environ deux tiers des entrepreneurs sont des hommes et un tiers sont des femmes. Cependant, parmi ceux qui sollicitent notre aide, nous observons une quasi-parité. Cela s’explique par le fait que les femmes sont souvent plus enclines à rechercher de l’aide et à s’ouvrir sur leurs difficultés. Nous aidons des profils variés, allant du gérant d’une friterie au start-upper ayant levé plusieurs millions. Nous accompagnons également des entrepreneurs issus de l’immigration ou ne parlant pas toujours français, bien que cela puisse poser des défis supplémentaires en termes de communication. En somme, notre public cible est très hétérogène, incluant des personnes avec peu de diplômes et d’autres surdiplômées, chacun ayant des besoins et des parcours uniques. »

 

Quelles sont les conditions pour bénéficier de votre aide chez Revival ?

Sébastien Hamende : « Deux conditions principales doivent être remplies. Premièrement, il faut être entrepreneur, car notre programme est spécifiquement conçu pour les entrepreneurs en difficulté. Deuxièmement, la décision d’arrêter l’activité doit être posée ou actée. Nous ne pouvons pas aider les entrepreneurs qui sont encore dans le déni et qui espèrent sauver leur entreprise à tout prix. Il est important de noter qu’il n’existe aucune autre structure en Belgique qui aide les entrepreneurs après une faillite ou une fermeture. Alors que l’État prévoit des aides pour les salariés, il n’y a rien de similaire pour les entrepreneurs. C’est pourquoi Revival intervient pour offrir un accompagnement personnalisé et complet, aidant les entrepreneurs à rebondir tant personnellement que professionnellement. »

 

Vous avez un taux de rebond très inspirant de 81 %. Comment expliquez-vous le succès de votre programme ?

Sébastien Hamende : « Notre taux de rebond de 81 % est le fruit de l’engagement et la passion de notre équipe. Nos coachs et bénévoles sont très motivés et investis. Grâce à des bilans de compétences, ils aident les entrepreneurs à identifier leurs forces et leurs axes d’amélioration. Cependant, chaque participant doit être l’acteur principal de son rebond, nous insistons sur son implication active. Notre processus inclut un comité d’adhésion qui vérifie que les entrepreneurs sont en énergie et capables de suivre le programme. Si nécessaire, certains doivent d’abord consulter un psychologue. Les possibilités de rebond sont multiples : retour au salariat, lancement d’une nouvelle activité indépendante, ou reprise d’une formation. Nous offrons également des formations internes pour nos experts, notamment pour les mentors, qui sont souvent des entrepreneurs en activité. Nos coachs, tous certifiés, bénéficient d’une formation continue pour garantir un accompagnement de qualité. »

 

Le professionnalisme est une des valeurs incarnées par Revival. Comment sélectionnez-vous vos experts et rencontrez-vous des problèmes de recrutement ?

Sébastien Hamende : « Nous sélectionnons nos experts via un comité d’adhésion et proposons des formations internes, notamment pour les mentors. Tous nos coachs sont certifiés et bénéficient d’une formation continue, ce qui garantit un accompagnement de haute qualité. Nous rencontrons des problèmes de recrutement, surtout en province. Certaines régions, comme les Ardennes, nécessitent encore de nouvelles recrues pour couvrir toutes les zones. Nous sommes constamment à la recherche de nouveaux bénévoles pour renforcer notre équipe et assurer un accompagnement de qualité partout en Belgique. »

 

Vous parlez de déni chez certains entrepreneurs, cela est souvent dû au fait que l’échec est extrêmement stigmatisant. Avez-vous observé une évolution dans la perception de l’échec depuis le début de Revival ? Pensez-vous qu’il reste encore beaucoup à faire pour réduire cette stigmatisation ?

Sébastien Hamende : « Au début, parler de l’échec était difficile et souvent évité dans les cercles d’affaires. Par exemple, lors d’une conférence, l’organisateur m’a demandé de changer mon discours sur l’échec, car les membres trouvaient que le sujet était très mal perçu. Cependant, nous avons constaté une évolution positive. Des initiatives comme les Fuckup Nights, où des entrepreneurs partagent leurs échecs, ont aidé à libérer la parole et à changer les mentalités. Ces événements attirent désormais de nombreux participants et contribuent à normaliser la discussion sur ce sujet. Bien que des progrès aient été réalisés, le chemin est encore long pour réduire la stigmatisation. La perception de l’échec varie culturellement et historiquement, avec des différences notables entre les pays anglo-saxons et européens. Dans les pays anglo-saxons, l’échec est souvent perçu comme une étape nécessaire vers le succès, tandis qu’en Europe, il est plus stigmatisé. Ces différences s’expliquent en partie par des facteurs religieux. Par exemple, dans les cultures protestantes, la richesse est souvent vue comme une bénédiction divine, ce qui valorise le succès et minimise la honte de l’échec. En revanche, dans les cultures catholiques, la richesse peut être perçue comme taboue. En Belgique, il est encore nécessaire de sensibiliser davantage et de promouvoir une culture où l’échec est vu comme une opportunité d’apprentissage et de croissance. »

 

En parlant d’échec, comment expliquez-vous la cause des faillites chez nous ? La Belgique est-elle un terrain favorable pour les entrepreneurs ?

Sébastien Hamende : « Tout d’abord, je tiens à souligner que la faillite n’est pas une fatalité. L’échec, le deuil, la mort font partie de la vie, ils permettent de recycler et de renouveler nos talents et l’essentiel est de rebondir, et d’atterrir en douceur ce sur quoi nous travaillons. Les causes des faillites en Belgique sont souvent liées à des problèmes de gestion, comme une mauvaise vue sur l’administratif et la comptabilité, ainsi qu’un manque d’innovation et de vision à long terme. Beaucoup trop d’entrepreneurs oublient qu’ils sont les pilotes de leur entreprise et que ce n’est en aucun cas au comptable d’assumer ce rôle. La responsabilité finale de la gestion administrative incombe à l’entrepreneur. Chez Revival, nous travaillons sur ce point. En outre, les entrepreneurs peuvent manquer de réseaux pour les soutenir en cas de difficulté. En ce qui concerne la Belgique comme terrain pour les entrepreneurs, elle n’est pas défavorable, mais pourrait être beaucoup plus favorable. Les barrières administratives et fiscales sont importantes, ce qui complique la situation des indépendants. Les obligations administratives sont énormes et la fiscalité est perçue comme une catastrophe, avec une part importante des revenus des entrepreneurs allant aux impôts et charges sociales. Il est crucial pour les entrepreneurs de se faire accompagner, et des partenaires comme la Banque Van Breda sont là pour les soutenir dans leur parcours. »

 

Pouvez-vous expliquer comment vous parvenez à offrir vos services gratuitement et quelles sont vos sources de financement ?

Sébastien Hamende : « Grâce à plusieurs sources de financement. La fondation Pulse a été créée par de grandes familles entrepreneuriales belges qui mettent en commun des fonds pour soutenir des actions comme celles de Revival. Nous avons également des sponsors, tels que la Banque Van Breda, qui souhaitent contribuer à la responsabilité sociétale en aidant les entrepreneurs. Ces différentes sources de financement nous permettent de maintenir nos services gratuits et de continuer à aider les entrepreneurs en difficulté. »

 

En quoi le fait que Revival soit dirigé par des entrepreneurs pour des entrepreneurs renforce-t-il l’initiative ?

Sébastien Hamende : « Le programme Revival qui aide les entrepreneurs en rebond ne fonctionne que parce qu’on a des entrepreneurs qui ont bien réussi et ont décidé de jouer dans la cour de la philanthropie. Si on n’avait pas des entrepreneurs à succès, je n’aurais pas de philanthropes et Revival n’existerait pas. C’est un cercle vertueux. Quand on voit aujourd’hui ce que l’économie et les entrepreneurs qui réussissent génèrent comme bénéfices, ça percole toujours sur d’autres choses. »

 

Avez-vous besoin de davantage de partenariats comme celui avec la Banque Van Breda, et comment envisagez-vous l’évolution de Revival ?

Sébastien Hamende : « Oui, nous avons besoin de davantage de partenariats à l’image de la Banque Van Breda pour assurer l’expansion de Revival. Bien que nous soyons déjà en mesure d’accompagner un nombre significatif d’entrepreneurs, la demande est bien supérieure. Pour répondre à cet enjeu, nous cherchons activement à élargir notre réseau de partenaires. Il s’agit aujourd’hui de “scaler” et en ce sens nous avons besoin de davantage de partenariats. Nous accompagnons actuellement entre 150 et 200 entrepreneurs par an. Or, 10 000 font faillite et 100 000 cessent leurs activités chaque année. »

 

Votre besoin de vous élargir et la nécessité de vous soutenir sont palpables. Si vous aviez une baguette magique, quelle réalisation souhaiteriez-vous voir se concrétiser au profit de Revival ?

Sébastien Hamende : « Si j’avais une baguette magique, je souhaiterais que les pouvoirs publics s’emparent de la question liée à l’aide octroyée aux entrepreneurs en situation de cessation d’activité. Aujourd’hui, l’échec entrepreneurial est souvent stigmatisé, et l’aide se concentre principalement sur les salariés. Pourtant, sans entrepreneurs, il n’y a pas d’emplois. Il est crucial de reconnaître que ces derniers sont le moteur de notre économie et qu’ils méritent un soutien équivalent. En intégrant cette perspective, nous favoriserions non seulement leur rebond, mais aussi la création de nouveaux emplois et le développement de secteurs clés. Ce serait un changement fondamental pour atteindre nos objectifs de mise à l’emploi et renforcer notre tissu économique. »

 

Revival peut compter sur le soutien de la Banque Van Breda

 

Dimitri Bauters, Directeur régional et responsable sectoriel entrepreneurs Bruxelles-Wallonie :


« Nous travaillons principalement avec des entrepreneurs à succès que nous accompagnons dans leur constitution patrimoniale afin d’acquérir ou de conserver l’indépendance financière. Étant donnée notre spécialisation, nous avons donc peu de clients confrontés à la faillite.

Néanmoins, nous souhaitons soutenir l’entrepreneuriat au sens large et avoir plus d’impact sociétal, c’est une des raisons pour lesquelles à côté de notre métier de conseiller patrimonial, nous souhaitons également soutenir les entrepreneurs qui ont connu un échec. La collaboration avec Revival est étroitement liée à notre ambition d’aider les entrepreneurs dans les bons, mais aussi dans les jours plus difficiles. Nos entrepreneurs demeurent et sont le principal moteur de la prospérité de notre pays. Ils méritent les soins et les conseils que Revival leur fournit. Nous sommes vraiment fiers de pouvoir contribuer à ce beau projet que nous soutenons chaleureusement. »

Warda Chairi
Warda Chairi

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